L’impact des équipes dirigeantes

(Article traduit de Richard Barrett)

Titre original « Cultures created by Leadership Teams and Groups »

LES VALEURS DE L’EQUIPE DIRIGEANTE
Notre travail depuis des années nous a permis de constater que le niveau de conscience de l’équipe de direction joue un rôle décisif dans la détermination des questions que pose une culture d’entreprise. A partir des milliers d’études que nous avons conduites, nous sommes arrivés à quelques conclusions générales que nous considérons comme relativement justes.

          Règle n°1 : une entreprise ne peut pas fonctionner à un niveau de conscience supérieur aux valeurs personnelles de son équipe dirigeante.
          Règle n°2 : la culture d’une entreprise est le reflet des valeurs personnelles de l’équipe dirigeante (conscientes ou inconscientes) ou le reflet des valeurs héritées par les équipes dirigeantes passées.
          Règle n°3 : en général, la plupart des entreprises fonctionne avec une culture « par défaut » parce qu’elle se met en place de manière inconsciente. La culture n’est pas gérée; elle n’est pas pilotée; la culture est simplement reconnue comme la manière dont « on » fonctionne!

Dans de telles situations, lorsque l’équipe dirigeante prend connaissance d’un diagnostic de culture réalisé avec l’évaluation de la cohérence culturelle d’une organisation (CVA), elle est frappée de voir que la la culture qu’elle génère se situe à un niveau inférieur à leur niveau de conscience personnel. Cette équipe tombe dans la trappe du consentement implicite à la manière dont « on fait les choses chez nous ». Elle n’est pas consciente de ce qu’elle a créé et elle manque de savoir-faire pour imaginer et piloter la culture qu’elle souhaite. En outre, il n’est pas rare qu’elle ne voit pas le lien entre ses comportements collectifs et la culture qu’elle désire.

Notre recherche a montré que les cultures crées par les équipes dirigeantes peuvent être catégorisées en 5 types de culture, selon le poids d’entropie culturelle supporté par les différents niveaux hiérarchiques de l’entreprise.

Culture de l’ombre portée
La culture de l’ombre portée se caractérise par un fort niveau d’entropie de l’équipe dirigeante qui diminue ensuite au fur et à mesure que l’on descend les niveaux hiérarchiques. Le dysfonctionnement des personnalités de la direction projette une ombre portée sur toute l’entreprise; néanmoins, plus on s’éloigne de la direction, moins les effets de son entropie sont perceptibles.

Culture de déni
La culture de déni se produit lorsque l’équipe de direction présente un taux d’entropie faible alors que le niveau n-1  présente un fort taux d’entropie qui diminue graduellement avec les niveaux subalternes. L’équipe de direction vit dans son monde, inconsciente du chaos qu’elle a créé. Elle est dans le déni et leurs collaborateurs immédiats doivent réparer les dysfonctionnements des dirigeants.

Culture coincée
La culture « coincée » se caractérise par un niveau d’entropie culturelle bas ou modéré de l’équipe de direction, mais celui-ci s’élève dans l’encadrement intermédiaire et diminue à nouveau quand on se rapproche du terrain. Les dysfonctionnements se présentent au niveau intermédiaire, non pas parce que l’équipe dirigeante dysfonctionne, mais parce qu’elle repousse la pression des résultats sur le niveau intermédiaire et les niveaux suivants. Ce type de culture se produit lorsque les managers se voient confier des responsabilités sans se voir confier l’autorité.

Culture de crise
La culture de crise se caractérise par des niveaux d’entropie élevés à tous les niveaux hiérarchiques. On la trouve souvent dans de grandes entreprises, souvent publiques, dans lesquelles le poids de la bureaucratie et la rigidité de la hiérarchie sont importants.  Une partie du problème est due à ce que l’équipe dirigeante se sent impuissante pour modifier la culture en raison d’interférences politiques et/ou d’une syndicalisation puissante. Notre expérience nous suggère que les patrons politiques et syndicaux se mettent à collaborer quand ils  comprennent le but de la transformation culturelle et commencent à apprécier le changements de climat interne et de performances associés à un programme de transformation. Les deux groupes ont intérêt à être embarqués très en amont de la transformation, en partageant notamment les raisons de se transformer.

Culture inspirée par les valeurs
La culture inspirée par les valeurs se caractérise par un faible niveau d’entropie à quelque niveau que ce soit dans l’organisation. Les cultures inspirées par les valeurs sont l’heureux produit d’un management éclairé  et/ou d’un leadership inspirant, et sont les cultures les plus performantes.Elles sont en général managées de manière très consciente: le leader et son équipe ont choisi leurs valeurs et les font vivre. Ils les renforcent quotidiennement en se référant explicitement à elles et en les intégrant dans les moindres process et systèmes de l’entreprise.  Ils mesurent régulièrement où ils en sont, sur un plan collectif comme sur un plan individuel. Les promotions ne sont pas seulement réalisées à partir des performances mais aussi à partir de la manière dont les personnes mettent en oeuvre les valeurs.

 

Conclusion
Nous pouvons classer les 4 premières cultures comme « cultures par défaut » parce qu’elles se produisent de manière inconsciente. Elles sont l’expression des personnalités actuelles ou passées qui ont imprimé leur marque sur l’entreprise. Aucune d’entre elles n’a voulu réellement manager la culture et piloter l’entreprise par les valeurs. Alternativement, la cinquième catégorie est celle d’une culture inspirée par les valeurs. Dans des cultures d’entreprise de ce type, l’équipe dirigeante imagine et organise la culture qu’elle veut vivre et gère son capital culturel.  A cet effet, non seulement cette équipe pilote son entropie personnelle, mais elle essaie de remplacer les freins hérités des équipes antérieures en procédant à une mise en cohérence structurelle approfondie. Elle s’assure que les valeurs qu’elle veut vivre sont bien intégrées dans les systèmes, les politiques et les procédures de l’entreprise,  et les valeurs désirées sont utilisées dans les systèmes de motivation.